
Vous le savez déjà; c’est une mauvaise idée. La danse, c’est un médium horrible pour raconter des histoires. Avez-vous déjà vu un épisode de So You Think You Can Dance où les chorégraphes expliquent la petite histoire derrière leur pièce de deux minutes? Ça prend une couple de Gravols juste pour passer à travers toutes les quétaineries qui sortent de leurs bouches. C’est sans parler de la danse elle-même…
Pour son nouveau spectacle de danse-théâtre, la chorégraphe Deborah Dunn s’est inspirée d’Orlando de Virginia Woolf. C’est correct. Le problème, c’est qu’elle est demeurée beaucoup trop près du texte. En fait, on pourrait presque plus parler d’adaptation que d’inspiration. Si une scène de bal est pour être une platitude chorégraphique, pourquoi en avoir une?
Dans sa pièce de groupe précédente, Nocturnes, Dunn s’était inspirée du mélodrame. Elle avait étudié la gestuelle mélodramatique et l’avait amplifiée jusqu’à ce qu’elle devienne danse. Ici, rien n’est aussi poussé, rien ne se transforme. Tout demeure dans la performance costumée mais désincarnée, de sorte qu’on a souvent l’impression d’assister à un spectacle collégial plutôt que professionnel. Ce n’est pas assez dramatique ou assez drôle (même si les six interprètes nous lancent des clins d’œil à chaque minute); c’est trop éclairé et certainement trop littéral. C’est aussi, disons-le, chorégraphiquement pauvre.
À la fin du spectacle, Dunn délaisse le théâtre et offre un losange aux angles de duos simultanés. Ce n’est pas que ça devient soudainement chorégraphiquement génial, mais l’amélioration est flagrante maintenant que le mouvement ne tombe pas dans une symbolique, dans un théâtre physique facile.
Je n’ai pas besoin de mouvements qui veulent dire quelque chose; j’ai besoin de mouvements qui disent quelque chose. C’est la beauté de la danse contemporaine : le mouvement parle de lui-même; on n’a pas besoin de lui imposer une signification littéraire.
Dunn devrait avoir plus confiance en ses qualités de chorégraphe. Voilà ce que je suggère pour son prochain show : pas de texte, pas d’éclairage théâtral, pas de musique, même pas de costumes. Après tout, on parle de danse contemporaine. Ce serait comme un saut dans le noir, un peu épeurant. La peur est souvent un bon guide artistique.
Orlando
14-16 mars à 20h & 17 mars à 16h
Agora de la danse
www.agoradanse.com
514.525.1500
Billets : 26$ / Étudiants & moins de 30 ans : 18$