Le critique de danse que je suis se pointe à l’Usine C pour assister à une pièce de théâtre et ne se retrouve que dans le mouvement. Vauban, texte d’Alain Farah mis en espace par Marie Brassard, se veut une contre-utopie où le mouvement des gens est régi par les Oligarques. Ce futur proche, raconté par Brassard, est vu à travers les yeux d’un architecte dont les labyrinthes aident à circonscrire les déplacements de la population, et ceux de son fils, dont les migraines créent des obstructions dans son champ de vision. Ces obstructions prennent la forme des labyrinthes de son père, une touche de réalisme magique qui rejoint la mise en espace de Brassard. |
À travers l’imagination de cet enfant d’architecte, Vauban démontre que, lorsque le littéral est défendu, le symbolique vient à la rescousse et prend sa place. Le garçon construit des structures à partir de blocs, une ville de son propre cru où il pourrait bouger comme bon lui semble. Alors qu’il sommeille dans son lit, Brassard passe un large balai muni de petites lumières qui projettent l’ombre de cette ville imaginée sur les murs de la chambre. La pièce prend place dans une nuit perpétuelle, une nuit qui fait appel aux rêves, espace de toutes les libertés. La nuit qui permet aussi – à l’encontre du jour qui accentue la visibilité – un peu plus de liberté à ceux qui demeurent éveillés, leurs corps dissimulés dans la pénombre. Évidemment, cette nuit symbolise l’aveuglement grandissant du garçon.
La nécessité d’une liberté de mouvement, quelle qu’elle soit, se voit dans les paroles du personnage qui dit, « Je ne bougeais plus que dans ma parole. Je parlais car je ne voyais pas. » Alors qu’il réussit à naviguer les labyrinthes de son père à l’aide des plans que ses migraines lui imprègnent dans l’œil, sa nouvelle liberté de mouvement efface l’importance du symbolique : « Toute parole me paraissait désormais veine. »
Malgré son sujet contre-utopique, Vauban est d’une belle simplicité, un petit trente minutes aussi doux que les rêves dans lesquels il baigne. À cet effet, la musique ambiante de Tim Hecker (Ravedeath, 1972) est judicieusement utilisée pour colorer le récit, planant entre l’inquiétude du réel et la beauté de l'imaginaire.
21 & 22 octobre à 20h30
Usine C
www.usine-c.com
514.521.4493
Billets : 10$