Local Gestures
because the personal is cultural
Two Times Soft, de Maarten van der Put & Pauline Roelants D’un néon à un autre, aux quatre coins du corps, la lumière froide révèle un plancher bleu. La danseuse Pauline Roelants y est étendue, comme endormie. Elle ouvre les yeux. Entre ses jambes, une centaine de verres brisés. Son corps huilant se met en mouvement et les verres se déplacent autour d’elle, changent de formation en épousant sa forme serpentine. Elle trace son chemin dans ce labyrinthe de verre. Son pied, tel animé par un spasme pendant le sommeil, frappe des verres. Verre contre verre, le bruit crée une tension; la fragilité du verre est une menace pour la fragilité du corps. Briser l’un et l’autre risque de briser aussi. Les différentes formes de verres laissées par les bordures coupantes donnent à chacun d’entre eux une musicalité distincte. Fermez les yeux et vous pourriez croire entendre les notes d’un xylophone. Co(te)lette, d’Ann Van den Broek Bouge ton cul. Mets-toi à quatre pattes et bouge ton cul. En talons hauts, bouge ton cul. Dans ta petite robe blanche, bouge ton cul.
C’est ce que les trois interprètes de Co(te)lette nous mettent d’abord dans la face. Puis le cul s’affaisse, le bassin se contracte, et même s’il n’y a pas d’hommes sur la scène, on les sent partout. Lorsqu’on parle de Co(te)lette, on parle de deux performances simultanément : de la performance théâtrale et de la performance du genre. Les danseuses prennent des poses de mannequins, mais le font de façon robotique pour dénoter que tout ça n’est qu’artificiel, même leurs sourires synchronisés. L’une prétend caresser ses longs cheveux, même si ceux-ci sont dans un chignon. Elles viennent à la rencontre du public, s’écartent les jambes et baisent le plancher. Elles font signe du doigt : viens ici. On parle de deux performances simultanées parce que ce ne sont pas que les interprètes qui sont vus; même hors du théâtre, nous sommes tous vus. Notre comportement est toujours régenté de l’extérieur. On demande qu’elles affichent leur désir, qu’il soit réel ou non. C’est pour le bénéfice de ceux qui les regardent de toute façon. Et, comme on pourrait être vu à chaque instant, ce désir doit être ininterrompu. « Moi! » Les relations humaines sont transformées en compétition. Il faut imiter les autres femmes. Il faut être plus sexuelle qu’elles. Alors, peut-être aurons-nous la chance d’être choisie. Une femme est dévêtue, maltraitée et abandonnée devant le public, comme une offrande. Les trois présentent un de leur sein comme si elles étaient des hôtesses à The Price Is Right. On pourrait être dans un spectacle de danse ou dans un club. C’est la même chose; on est là pour être vu. On se balance d’une patte à l’autre et une fois de temps en temps on se fait tournoyer pour signifier qu’on a vraiment du fun, qu’on est le fun. On rit pour que les autres pensent qu’on les trouve drôles. On se saoule et la tristesse est exposée à mesure que la façade s’écroule. Elles se frappent le corps jusqu’à en être couvertes de rougeur. Notre réaction est viscérale. Leurs corps ne sont pas seulement vus; ils sont ressentis. Ils sont leurs corps. Il y a cette même tension dans ce geste du doigt qui pointe vers l’autre pour ensuite se retourner vers soi : vivre pour le regard de l’autre, mais dans l’impossibilité de s’anéantir. Two Times Soft 19-21 novembre à 19h Billets : 15-18$ Co(te)lette 19-21 novembre à 20h Billets : 24-30$ Usine C www.usine-c.com 514.521.4493
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Sylvain Verstricht
has an MA in Film Studies and works in contemporary dance. His fiction has appeared in Headlight Anthology, Cactus Heart, and Birkensnake. s.verstricht [at] gmail [dot] com Categories
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