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LE PASSÉ SYLVAIN VERSTRICHT : On dit que MAYDAY remix est une façon de « clore un cycle de travail pour [te] tourner vers l’avenir. » Quand tu regardes les œuvres qui sont maintenant derrière toi (Goodbye & Junkyard/Paradis, entre autres), quels liens vois-tu entre elles? Qu’est-ce qui les caractérisent pour toi? MÉLANIE DEMERS : Je navigue dans l'univers de ces deux pièces depuis environ 5 ans. J'appelle ce cycle « le cycle des clans » car les œuvres se sont beaucoup inspirées de ce petit microcosme artistique que j'ai créé. Les esthétiques sont différentes. Junkyard/Paradis est foisonnante, flamboyante, chaotique, alors que Goodbye est plus léchée, monochrome et labyrinthique. Mais les préoccupations sont les mêmes : le vivre-ensemble, le renversement des situations, l'envers du décor, le beau dans le hideux, et surtout, le désir de trouver un sens à tout ça... Ça... l'amour, la mort et tout le reste. MAYDAY remix est né d'un désir de faire table rase. De partir sur de nouvelles bases. De danser sur la tombe de ces œuvres. Comme dans un grand feu de joie, je propose qu'on les y jette. On les transforme. On les massacre. On les détruit. Jusqu'à la plus petite particule possible. Et une fois en suspension dans l'air... Peut-être vais-je pouvoir, enivrée, en vivre délivrée. LE PRÉSENT SYLVAIN VERSTRICHT : En offrant ton travail à remixer à d’autres artistes, tu te transformes d’une certaine façon de créatrice en spectatrice. As-tu remarqué des différences dans la perception de ton travail dans ce glissement? Est-ce qu’il y a des surprises dans ce que les « remixeurs » ont ressorti de tes œuvres? MÉLANIE DEMERS : En fait, en offrant à d'autres artistes le répertoire de MAYDAY, je deviens productrice, commissaire, interprète et spectatrice. Tous les remix n'ont pas la même teneur et je n'ai pas la même relation avec tous les remixeurs. Là où je participe en tant qu'interprète (le remix de Junkyard/Paradis par Catherine Vidal et le remix de Goodbye par Olivier Choinière), j'assiste à toutes les mutations, à tous les éclats de génie, à tous les doutes et à toutes les décisions. Il y a quelque chose de beau et de monstrueusement inconfortable à assister à ces changements. En même temps, c'est vraiment libérateur! Je vois d'autres personnes se faire les dents sur du matériel que j'ai aimé, en lequel j'ai cru, mais que je suis prête à voir se transfigurer! Là où je suis impliquée de façon plus diagonale, comme la performance des Fermières Obsédées, l'objet vidéo de Xavier Curnillon, le remix littéraire de Catherine Leroux, la proposition chorégraphique de Catherine Gaudet ou comme le remix de la musique par Poirier, je n'ai encore rien vu ni entendu. Ils travaillent en vase clos, à partir de la matière qui existe déjà et je dois faire confiance à leur talent, à leur connaissance et à leur plaisir à utiliser les mots, les gestes, les sons et les images qui ont fait les beaux jours de MAYDAY. Je devrai donc apprécier le déplacement de focus qui s'opère lorsque ces artistes s'approprient le matériel de nature chorégraphique et s'en empare en le pliant à leur médium à eux. Parfois, les remixeurs s'attardent aux détails, s'enfargent dans les détours ou s'attaquent aux défis. Tout le monde a un axe, un plan d'attaque ou une stratégie, mais au moment de se mesurer au remix, il y a une multitude d'équations à régler et chaque décision a une conséquence semblable à l'effet papillon. Il y a une logique intérieure à respecter et c'est un peu comme jouer au mikado où lorsqu'on retire un élément tout le reste se fragilise. Ça prend beaucoup de doigté pour épurer ou purifier le travail. Et étonnamment, c'est ce que la plupart des artistes ont envie de faire... Il y a un espace d'inconnu immense dans ce projet qui requiert un abandon que je ne me connaissais pas. Parfois, je me demande ce qui m'a pris de me mettre dans cette situation. Mais le frisson ressenti à créer une soirée éclectique, pleine de rebondissements, et où je contrôle si peu, est enchantant! Il y a aussi une excitation à travailler dans l'urgence. Tous les projets de MAYDAY remix seront bouclés en trois semaines, environ une dizaine de répétitions. C'est un rythme qui demande une grande disponibilité de la part de tous. Il y a une sensation d'immédiateté. C'est cool! Mais c'est casse-cou. Complètement casse-cou! L’AVENIR SYLVAIN VERSTRICHT : Entrevois-tu comment tes prochaines œuvres différeront de tes précédentes? Vers quoi te tournes-tu? MÉLANIE DEMERS : Après MAYDAY remix, j'entrevois dans mon travail un moment de repli. Une introspection nécessaire pour réinvestir la scène de façon différente. Je travaille sur l'idée d'un solo. Étant une femme de clan, c'est un aspect qui m'effraie un peu. Mais je ressens le besoin de me replier et de retourner dans les tranchées avant de repartir au combat. J'ai besoin d'aller voir à l'intérieur et de regarder de plus près les drames qui s'y trament! À bientôt, mélanie x 12-14 mars à 20h Usine C www.usine-c.com 514.521.4493 Billets : 30$ / Étudiants ou 30 ans et moins : 24$
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Des bandes blanches montent une pente en arrière-scène sur des diagonales. Selon la teinte de l’éclairage, elles pourraient être des vagues ou des rafales de sable au fond de l’océan. Au-dessus, des petites lumières pour étoiles. Haut, en avant-scène, deux bandes de pellicule plastique font danser la lumière. La scène baigne dans le bleu de la nuit ou de l’eau. Après la naissance obligatoire, la chorégraphe et interprète Emmanuelle Calvé se laisser aller à des mouvements enfantins. Richard Desjardins parle du désir humain d’être autre, souvent un oiseau, « pour le vertige, » et sûrement aussi pour voler au-dessus du danger qui semble toujours nous guetter, les bêtes terrestres. Dans EMMAC Terre marine, Calvé utilise la marionnette pour permettre à l’être humain ces transformations animales et le replacer dans son alignement ancestral. À partir d’une position à genoux, elle utilise ses bras pour se propulser dans un glissement sur le ventre, comme ce morse habité par les manipulateurs de marionnettes, l’acteur Jean-François Blanchard et la danseuse Jody Hegel. Calvé imite les animaux qui l’entourent et leur rencontre se fait dans le ludisme. La scénographie de Richard Lacroix est simple et efficace. Le blanc permet à la lumière de transformer l’environnement. L’orange rosé nous transporte au crépuscule. Une seconde de lumière blanche nous emmène dans une extrémité polaire. À vouloir tout être dans sa multidisciplinarité, peut-être, EMMAC nous offre une version anémique de tous les médiums à son emploi. Les mouvements de danse de Blanchard et Hegel, qui ne semblent être là que comme faire-valoir de Calvé, sont accessoires, limités à les faire sortir de scène avec une fioriture après avoir changé le costume de Calvé. La musique de Jorane est parfois parfaitement planante pour nous immerger dans un monde aquatique, tandis qu’à d’autres moments elle est trop cinématique, trop mouvementée pour la scène. Le talent de Hegel est sous-utilisé, alors que Calvé ne réussit pas à démontrer qu’elle a encore ce qu’il faut pour porter sur ses épaules ce qui est essentiellement (malgré le grand nombre de collaborateurs) un spectacle solo. 8 & 13-15 mars à 20h / 12 mars à 14h Théâtre Rouge du Conservatoire www.danse-cite.org 514.873.4031 #313 / 514.844.2172 Billets : 28$ / Étudiants : 20$ |
Sylvain Verstricht
has an MA in Film Studies and works in contemporary dance. His fiction has appeared in Headlight Anthology, Cactus Heart, and Birkensnake. s.verstricht [at] gmail [dot] com Categories
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