Local Gestures
because the personal is cultural
Hora, c’est un titre un peu fourre-tout : ça pourrait tout autant référer à l’astrologie, une danse, une déesse, la prostitution, ou le temps. C’est donc un titre approprié pour la nouvelle pièce d’Ohad Naharin, dont la chorégraphie est elle aussi un peu fourre-tout, tout en évitant le côté péjoratif que le terme pourrait insinuer. On pourrait même parler de cadavre exquis synthétisé par le corps athlétique des onze danseurs. Alors, l’esthétique ne cesse de se balancer d’un bord et de l’autre de la ligne moderne/postmoderne. À l’art visuel moderne on emprunte le décor : des murs uniformes couleur vert lime pastellisée, longés en arrière-scène d’un long banc linéaire où les interprètes peuvent avoir un moment de répit. Côté danse, on recule même dans le temps jusqu’à retrouver les jambes musclées et entrecroisées du ballet, mais supportant un haut-de-corps qui préfère laisser pendre les pattes de devant tel un chien attendant un biscuit-récompense de son maître. De la danse postmoderne, donc, on emprunte un regard sans jugement sur le mouvement. Ceci permet à l’humour de certaines gestuelles d’émerger organiquement sans avoir à le trouver dans une théâtralisation facile. Similairement, des mouvements qui pourraient être perçus comme étant plus féminins ou masculins sont performés par tous les danseurs indépendamment de leur sexe, de sorte qu’ils s’en trouvent simultanément dé/genrés. Cette démocratisation du mouvement fait que la chorégraphie est toute en contraste. Souvent le mouvement n’est pas athlétique, même si les danseurs le sont clairement. Les gestes sont tantôt pausés/posés, tantôt suspendus dans la lenteur, tantôt caféinés. Les mouvements sont souvent répétés tels de petites phrases exclamatives. Par moments, c’est cacophonique, onze soli simultanés; le moment suivant, tout peut être synchronisé. La musique que vous vous imaginez pour supporter tout ça n’est sûrement pas la bonne. Naharin et le musicien Isao Tomita y vont d’un choix particulier et audacieux, des thèmes connus (Also Sprach Zarathustra, La chevauchée des Walkyries, Star Wars) réinterprétés sur synthétiseur. On croirait regarder un film de science-fiction des années 70 avec un petit budget, mais de grandes ambitions (qu’il réaliserait sûrement, d’ailleurs). Bref, le genre de film dont la qualité serait accentuée en fumant un peu. À la fin d’Hora, quand la scène est plongée dans la noirceur et que tout devient un peu flou, la comparaison est encore plus à propos. On se réveille dans un rêve filmique, comme Rosemary avançant lentement à travers le mystère de Rosemary’s Baby. Malgré son apparence fourre-tout, Hora est en fait la chorégraphie la mieux définie que j’aie eu la chance de voir depuis un bail. Une autre façon de dire que c’est pour l’instant le meilleur spectacle de danse présenté à Montréal en 2012. Hora 1-3 mars à 20h Théâtre Maisonneuve www.dansedanse.net 514.842.2112 / 1.866.842.2112 Billets à partir de 27.60$
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Sylvain Verstricht
has an MA in Film Studies and works in contemporary dance. His fiction has appeared in Headlight Anthology, Cactus Heart, and Birkensnake. s.verstricht [at] gmail [dot] com Categories
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